Parmi les mesures retenues lors du Grenelle de l'environnement, celle-ci :
Energie
(...)
Interdiction des ampoules à incandescence d’ici à 2010.
Greenpeace assure qu'une « telle mesure va avoir un impact environnemental très fort. Interdire les ampoules à incandescence à partir de 2010 va permettre à la France d’économiser environ 11 TWh/an, ce qui correspond à la capacité de production d’un EPR », précise l'ONG.
Je viens - coïncidence ? - de recevoir, sur plusieurs listes de diffusion professionnelles (relatives à l'agriculture, l'alimentation, l'hygiène alimentaire) un message citant un "très intéressant" article à propos, justement, de l'interdiction des ampoules à filament au profit des ampoules basse tension (*).
L'article en question est titré "La folie de l'ampoule".
Il s'agit, tout simplement, de prouver que les lampes fluorescentes compactes ("CFLs") sont dangereuses et polluantes et qu'il est absurde de prévoir l'interdiction des ampoules incandescentes...
La démonstration est fondée sur la présence de mercure dans les ampoules CFLs, étayé par les faits scientifiques probants suivants:
"Sachant que les CFLs peuvent contenir des substances dangereuses, Bridges a contacté le magasin Home Depot le plus proche de chez elle pour se faire conseiller. Ce dernier l'a informée que les CFLs contenaient du mercure et qu'elle devrait contacter un centre antipoison."
La suite de l'article met en évidence le coût prohibitif de la dépollution (l'exemple de la moquette de la chambre à coucher , où une telle ampoule a été cassée par accident, et de la facture de 2 000 $ de l'entreprise de nettoyage spécialisée...), et l'extrême dangerosité de tous les sites où de telles ampoules hors d'usage seront jetées, ainsi que le gaspillage d'argent public avec les dépenses épouvantables de dépollution obligatoire.
Sur la responsabilité en suite de telles pollutions (par les ampoules basse tension), on lit ainsi "De tels assujettissements ont bouleversé inutilement de nombreuses vies dans le passé, coûté des dizaines de milliards de dollars et forcé de nombreuses entreprises à déposer le bilan." (pauvres pollueurs..)
Bien sûr, sont désignés comme cibles de ces complications absurdes, le "cauchemar réglementaire" que représente "le programme mis en place par l'Agence pour la Protection de l'Environnement (EPA) bien connu pour imposer des nettoyages de sites de déchets toxiques", ainsi que certains acteurs comme les "environnementalistes" et, nommément, "le groupe activiste Environmental Defense" ainsi que Greenpeace...
Bref, je suis tombé sur un intéressant exemple de ces campagnes de propagande anti-écologistes, comme il en sévit de plus en plus sur le net.
Permettez-moi d'étayer ce propos de quelques faits glanés en "tirant" sur les liens fournis.
Qui est "l'institut Molinari", sur le site duquel était mis en ligne l'article visé ici ?
"L'IEM s'est fixé comme mission de proposer des solutions alternatives et innovantes favorables à la prospérité de l'ensemble des individus composant la société.
L'IEM est une organisation à but non lucratif financée par les cotisations volontaires de ses membres : individus, entreprises ou autres fondations. Affirmant son indépendance intellectuelle, il n'accepte aucune subvention gouvernementale ni soutien de partis politiques."
Il n'est toutefois pas possible de connaître les entreprises qui paient des cotisations (ce qui rend "indépendant" cet institut).
Néanmoins, les "liens d'intérêt" sont évocateurs :
- Centre for the New Europe (Belgique)
"Comme la plupart des think tanks, le Centre est financé par des individus, des fondations et des entreprises. Il ne recherche pas et ne saurait accepter les dons d'aucun parti politique, faction ou gouvernement."
"Notre philosophie a plusieurs étendards: "libéral européen," "pro-marché," "individualiste," "progressive," et bien d'autres encore. Nous nous disons simplement "libéraux." "
- Euro 92 (France)
"Fondé en 1988, par Alain MADELIN, l'Institut Euro 92 rassemble des décideurs et responsables économiques.."
".. un réseau mondial de plus de 250 instituts et d'organismes partageant les mêmes conceptions d'une société de droit et de liberté"
On relèvera, en page d'accueil du site, une publicité pour un livre au titre alléchant : "Plaidoyer pour la mondialisation capitaliste".
- etc..
Les éditoriaux de l'institut Molinari sont disponibles sur son site :
quelques titres qui parlent d'eux-mêmes :
"Faut-il légiférer dans la lutte contre l’obésité ?" (devinez quelle est la réponse des industriels de la bouffe industrielle...)
"La Commission européenne défend-t-elle l'économie de marché ?" (c'est vrai, quoi, ces horribles collectivistes qui prétendent tout régenter et qui, horreur, souhaitent que la concurrence soit libre et non faussée..)
"Ce qui est en danger n'est pas le climat mais la liberté" (bon, c'est vrai, l'ultra-libéral Vaclav Klaus a lutté contre le régime soviétique, ça l'a marqué, mais, tout de même..)
"N'ayons pas peur de la concurrence des caisses automatiques dans les supermarchés !" (ben oui, il faut bien laisser aux vendeuses du temps pour aller faire leurs courses !)
"Droit au logement : la méthode du pompier-pyromane" (si on limite le droit des propriétaires à expulser les locataires, où va-t-on ?)
et, évidemment, "Claude Allègre: Against the Ecologically Correct" (sans commentaire...).
La page de références dans les médias est tout aussi claire :
On y trouve, bien sûr, Les liens vers "Les Echos", "l'Agefi", "Le Figaro", pas vraiment connus pour leur engagement environnementaliste, de même, d'ailleurs, que "Le Cri du contribuable" (?!), et, bien sûr, le site-type de propagande anti-écologiste, "a&e - agriculture et environnement" (pour mémoire, en vérifiant le site au moment où je pose ce lien, la note en-tête de page est titrée : "Ce "Grenelle" n’a de légitimité ni scientifique, ni républicaine" par Luc Ferry, philosophe, ancien ministre.).
Mais revenons tout simplement à l'article cité plus haut, "la folie de l'ampoule", signé Steven Milloy.
Qui est l'auteur ? Il est présenté en bas de l'article :
"Steven Milloy est l'éditeur des sites JunkScience.org (où l’article ci-dessus a été publié) et CSRWatch.com. Il est aussi, entre autres, chercheur associé au Competitive Enterprise Institute."
Le site "junkScience.org" (!) est inaccessible. Dommage.
Quant à CSRWatch.com, il est sous-titré : "CSR Watch/SRI Watch - Your eye on the anti-business movement"...
(souvenons que CSR = Corporate Social Responsability ; on parle plus fréquemment en France de RSE = responsabilité sociale et environnementale ; on trouve également RSI, ou, en français ISR, Investissement Socialement Responsable)
Et se présente ainsi (c'est moi qui souligne):
"Businesses are increasingly under attack by the anti-business movement, i.e. social activists operating under the banners of Corporate Social Responsibility (CSR) and Socially Responsible Investing (SRI). These activists threaten businesses, investor interests, jobs and the free enterprise system. This site monitors and comments on the anti-business movement."
"CSRwatch.com/SRIwatch.com is sponsored by the Free Enterprise Education Institute, a not-for-profit organization organized under section 501(c)(3) of the Internal Revenue Code."
Comme il m'arrive de temps à autre à rencontrer ce type de propagande, sous couvert de "vraie science", ou de "bon sens", ou de "rationalité économique", je crois que le moment est venu de les repérer comme tels, et d'en garnir une rubrique dédiée ...
(je ne suis pas opposé à l'idée de recevoir quelques suggestions de ta part, ami lecteur...)
_______
(*) Sur les lampes fluorescentes compactes (compact fluorescent lamp), on consultera avec intérêt les articles de Wikipedia, en français, ou, plus complet (comme d'hab) en anglais.
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