Un commentaire bien venu a corrigé une inexactitude dans une précédente note.
J'avais en effet relevé ironiquement (et à tort quant au reproche implicite que cela supposait) le fait qu'un arrêté quasiment identique au précédent venait "retirer" (et non "abroger", ou "annuler" ce dernier).
L'auteur du commentaire fournit un lien utile sur un article publié dans opus citatum et relatif, précisément, au droit du retrait (Les suites de l’arrêt d’Assemblée du Conseil d’Etat Ternon du 26 octobre 2001).
On y lit, en introduction, que "La problématique du droit du retrait s’inscrit dans la nécessité pour l’administration de pouvoir corriger ses erreurs. Celle-ci doit pouvoir, en vertu du principe de légalité, faire cesser les effets d’un acte illégal. Trois moyens permettent de faire disparaître de l’ordonnancement juridique un acte administratif illégal : l’annulation, l’abrogation et le retrait."
J'avoue toutefois me perdre dans un abîme de perplexité quant à l'intérêt intrinsèque de l'annulation de l'arrêté du 28 février 2007 (AGRP0700462A) et son remplacement un mois plus tard par un nouvel arrêté rigoureusement identique, à deux différences près, fondamentales comme on en jugera :
- dans la liste des visas, le dernier cité devient "l'article D.615-5-(II) du code rural, au lieu de "l'article D.615-5-II" (articles qui, comme je le relevais plus loin, n'existent ni l'un, ni l'autre) ;
- l'ajout d'un titre aux articles 1 et 2;
Les deux autres différences tiennent au fait même de la parution du nouvel arrêté :l'insertion de l'article 3, qui a pour seul objet, précisément, de retirer le précédent arrêté ; en outre, la date est différente (ainsi que le signataire, le nouvel arrêté étant signé par délégation, alors que le premier était signé du ministre).
Sauf à n'avoir point vu l'enjeu majeur nécessitant le recours à cette pratique (qui apparaît "comme une survivance de la théorie du « ministre-juge » applicable avant 1872," pour reprendre les termes de l'article d'opus citatum mentionné plus haut), la nature de ces modifications me paraît plus relever d'un simple rectificatif, en admettant qu'il soit nécessaire.
Et ne conviendrait-il pas, d'ailleurs, de compléter la liste des moyens dont dispose l'administration pour corriger ses erreurs (s'agissant, bien sûr, de la publication d'actes réglementaires) par ... le rectificatif ?
Certes, il ne s'agirait, par définition, que de corriger ainsi des erreurs formelles résultant de la non concordance entre le texte adopté et celui publié. En outre, si l'erreur à rectifier était susceptible, dans sa rédaction incorrecte, de créer un droit, le rétablissement de la situation voulue par le rédacteur de l'acte pourrait ne pas résulter simplement de la publication d'un rectificatif...
J'avais déjà remarqué avec intérêt l'usage "intensif" du rectificatif par le Journal officiel de l'Union européenne comme méthode pour pallier les insuffisances formelles d'une "présentation simplifiée" de certains actes lors des récentes adhésions de nouveaux Etats membres.
On peut, aussi, par exemple, relever une application particulière du rectificatif, telle qu'elle est mise en oeuvre par les rectificatifs parus au JOUE n° 165 du 27 juin 2007, p. 35, et qui concernent les deux règlements (CE) n° 208/2007 et 209/2007 de la Commission venant, pour le premier, "adapter", et pour le second "modifier" le règlement (CE) n° 3149/92 portant modalités d'application pour la fourniture de denrées alimentaires provenant des stocks d'intervention au bénéfice des personnes les plus démunies de la Communauté ; les rectificatifs ont pour objet d'annuler non pas les textes visés, mais... leur publication au JOUE.
Le même JOUE n° 165 du 27.6.2007 publie par ailleurs deux nouveaux règlements n° 724/2007 et 725/2007 ayant le même objet que ceux dont la parution est annulée.
Le dispositif en cause dans ces règlements est "à double détente". D'une part, l'acte de base est modifié en remplaçant des mentions (publiées dans les différentes langues de l'Union) figurant dans le texte de son article 7, par un renvoi à une annexe nouvellement créée qui les reprend (en les complétant pour tenir compte de l'adhésion de 2004) ; ce règlement modificateur est pris sur la base de l'article 6, prévoyant des modalités d'application, du règlement (CEE) n° 3730/87 du Conseil ; par un second règlement, pris cette fois-ci sur la base de l'article 56 de l'acte d'adhésion de la Bulgarie et de la Roumanie (adaptation des actes antérieurs à l'adhésion), cette annexe est remplacée pour inclure les mentions en bulgare et en roumain.
Or les deux règlements publiés au JOUE du 28.2.2007 était entachés de deux inexactitudes formelles ainsi corrigées par ceux publiés le 27.6.2007 :
- leur ordre de parution : le règlement d'adaptation (CE) n° 208/2007 venait remplacer une annexe nouvellement introduite par.. le règlement modificateur (CE) n° 209/2007 ; les nouveaux règlements sont numérotés 724/2007 pour le modificateur (en premier), puis 725/2007 (en second) pour celui venant adapter l'annexe introduite par le précédent.
- le règlement 209/2007 qui introduit l'annexe publie un texte comportant inexactement à ce stade les mentions en bulgare et en roumain, dont l'ajout devait résulter du second règlement "d'adaptation" ; le règlement 724/2007 publie ainsi l'annexe sans les mentions qui seront insérées dans la version de l'annexe remplacée par le règlement 725/2007.
Cela dit, l'usage du rectificatif semble dans certains cas couvrir des corrections fort proches de ce qui relèverait plutôt de la "modification". Ainsi, le rectificatif à la décision 2005/465/CE de la Commission (mise sur le marché d'un OGM - colza GT73) publié au JOUE L 165 du 25.6.2005 vient purement et simplement annuler la publication de ladite décision qui "doit être considérée comme nulle et non avenue" ; sans plus d'explication (un rectificatif n'est, tout de même, pas étayé de considérants...).
La même décision sera republiée au JOUE L 228 du 3 septembre 2005 sous le n° 2005/635/CE du 31.8.2005. Celle-ci diffère toutefois de la précédente en ce que son article 4, dans son paragraphe 2, ne fait plus référence à une annexe définissant des lignes directrices techniques pour son application ; et la décision ne comporte plus d'annexe.
Quant aux lignes directrices qui figuraient dans l'annexe de la décision "nulle et non avenue", elles sont reprises en annexe d'une recommandation de la Commission du 16 août 2005 relative aux mesures à prendre par le titulaire de l’autorisation pour prévenir tout éventuel dommage pour la santé et l’environnement en cas de dissémination accidentelle d’un colza (Brassica napus L., lignée GT73 — MON-00073-7) génétiquement modifié pour améliorer sa tolérance à l’herbicide glyphosate (2005/637/CE).
On relèvera que le considérant (8) de cette recommandation expose que "La Commission juge préférable en conséquence que la décision de mise sur le marché du colza MON-00073-7 soit complétée par des lignes directrices techniques spécifiques destinées à prévenir tout éventuel dommage pour la santé et l’environnement en cas de dissémination accidentelle de ce produit" : pourtant, le texte de la première décision 2005/465/CE intégrait bien ces lignes directrices. Un point de technique légistique doit, sans doute, m'échapper...
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