L'intervention de Manuel Valls lors du "débat sans vote" au Sénat, le 24 avril 2013 sur le thème de l'immigration professionnelle et étudiante est disponible dans le compte-rendu sur le site officiel, ici : http://www.senat.fr/cra/s20130424/s20130424_9.html#par_275. Les phrases suivantes prononcées par le ministre en introduction à son propos constituent un raccourci édifiant de l'approche dramatiquement erronée qui est la sienne, et je crois ainsi nécessaire de les examiner en détail ; je le cite : "Comment être faible quand des filières exploitent la misère humaine ? Quand des marchands de sommeil profitent de la détresse de ceux qui n'ont rien ? Il faut être ferme quand un étranger sans titre se maintient sciemment et illégalement sur notre territoire."
Dans les deux premières questions qu'il pose, le ministre dénonce l'exploitation de la misère humaine, par "des filières" ou par "des marchands de sommeil". On ne peut qu'approuver sa démarche, sauf à se demander quelle réponse il y apporte. Car, s'il s'agit de condamner celui qui exploite la misère humaine, notre code pénal devrait être susceptible de donner à la puissance publique les moyens de faire cesser cette exploitation. Il y a bien là des coupables présumés (les filières, les marchands de sommeil, bref : les exploiteurs) et des victimes certaines : les personnes dont la misère est ainsi exploitée.
Malheureusement, après avoir posé la question de cette exploitation (on relèvera toutefois que la question précise porte, en réalité, sur un choix de posture : "comment être faible quand.."), Manuel Valls y répond.. en s'attaquant aux victimes : "Il faut être ferme quand un étranger sans titre se maintient sciemment et illégalement sur notre territoire". Quel rapport avec les questions précédentes ? Evacuée, la sanction pénale contre les filières, les marchands de sommeil, les exploiteurs de la misère humaine ; non, il s'agit ici de condamner l'irrégularité de la situation administrative des étrangers - qui en sont bien, pourtant, les victimes. Dès lors, le débat ne portera que sur les meilleures façons d'appliquer le Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le sinistre CESEDA, compilation de lois d'exception.
On constate ainsi que toutes les belles paroles sur la richesse de la diversité dans notre pays sont démenties par une approche exclusivement fondée sur la discrimination "légale" entre les français et les non-français.
C'est ce point, fondamental, qu'il est urgent de mettre en débat - et pas seulement un débat sans vote.
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