L'office des publications des Communautés européennes annonce :
"La maison d'édition de l'Union européenne propose une version multilingue consolidée de la législation communautaire"
Ce communiqué est repris par Emmanuel Barthe dans son blog sous le titre "EUR-Lex : la base des textes officiels consolidés est maintenant exhaustive et traduite en 19 langues"
C'est effectivement un très beau travail, qui était déjà connu des utilisateurs réguliers de cette base, et les "usagers du droit" ne peuvent que s'en féliciter.
Quelques observations me semblent toutefois utiles.
Ainsi, dans la mesure où, comme le prétend le communiqué de presse de l'OPOCE : "Afin de rendre le droit communautaire à la fois transparent et accessible, les dispositions en vigueur dans l’UE ont été refondues en moins de 3000 actes législatifs.", il ne peut, bien évidemment, s'agir que d'une sélection d'actes - vraisemblablement ceux jugés les plus importants.
On peut s'en faire une idée en observant par exemple l'un des 20 domaines couverts par le répertoire de la législation communautaire, point d'entrée à ces textes consolidés :
02. Union douanière et libre circulation des marchandises
Allons à l'essentiel :
02.20 Instruments douaniers de base
A ce niveau, les trois principaux textes me semblent être :
- le code des douanes communautaire [règlement (CEE) n° 2913/92 du Conseil]
- les dispositions d'application du code des douanes [règlement (CEE) n° 2454/93 de la Commission]
- le tarif douanier commun [règlement (CEE) n° 2658/87 du Conseil]
Si les références de chacun des textes modificateurs de ces actes sont bien mentionnées - et il s'agit de liens renvoyant vers chacun d'entre eux, c'est très bien fait - aucun de ces trois importants textes n'est suivi d'une indication relative à son éventuelle consolidation.
En revanche, on découvrira, dans cette page, d'autres actes (d'un intérêt plus limité), pour lesquels des liens sont fournis qui pointent vers des versions consolidées ; il est vrai que ceux-là ne sont modifiés qu'un nombre très limité de fois (les trois textes de base que je cite plus haut ont fait l'objet, eux, de dizaines de modifications...)
Cela dit, en cherchant par l'interface de "recherche simple", option "législation consolidée" (et non plus par Législation en vigueur > Répertoire de la législation communautaire), on constate qu'il existe bien des versions consolidées du règlement "code des douanes" et de celui "portant dispositions d'application du code des douanes".
Pour le R 2913/92, par exemple, trois documents sont proposés (à ce jour), dont le dernier est le "01992R2913-20050511 " ce qui signifie qu'il s'agit de la version dont les modifications prennent effet le 11 mai 2005.
Ce règlement a toutefois, depuis, été modifié par un règlement du 20 novembre 2006 (n° 1791/2006 du Conseil) qui modifie un grand nombre d'actes dont le code des douanes, et qui est entré en vigueur le 1.1.2007 ; en l'absence (à ce jour, 10/7/2007) de cette modification dans le texte "consolidé", le code des douanes communautaires se lit comme concernant un territoire qui n'inclurait pas encore la Bulgarie et la Roumanie...
Quant au règlement d'application de la Commission, la version consolidée inclut bien 26 règlements modificateurs (ainsi que 17 rectificatifs...), et la version la plus récente disponible à ce jour est celle nommée "01993R2454-20060701" dont les modifications seraient celles prenant effet le 1er juillet 2006 ; elle intègre en fait les modifications par le règlement (CE) n° 883/2005 du 10 juin 2005 (qui est applicable, selon les dispositions concernées, à partir du 1.7.2004, du 1.10.2005, du 1.7.2005 ou du 1.1.2006).
Il se trouve simplement que, depuis ce texte modificateur, ont été publiés les règlements (CE) n° 215/2006, 402/2006, 1792/2006, 1875/2006, 214/2007 qui sont également venus modifier ultérieurement le règlement de base....
A la décharge du service de consolidation de l'OPOCE, les modifications introduites par ces derniers règlements sont applicables à des dates très variées, et certaines ne prendront effet qu'au 1.1.2008, ou au 1.7.2009. (ce type d'information n'est pas repris dans les documents consolidés CONSLEG)
Quant au règlement "tarif douanier commun", [(CEE) n° 2658/87], l'essentiel de son dispositif est représenté par son annexe (plus de 800 pages de tableaux), remplacée annuellement. Mais aussi modifiée dans l'intervalle : ainsi, depuis son dernier remplacement avec effet au 1.1.2007, l'annexe I du règlement 2658/87 a été modifiée par 6 règlements (sans parler des deux règlements, postérieurs à celui qui remplaçait l'annexe au 1.1.2007, mais qui modifiaient la version 2006 de ladite annexe).
La version consolidée OPOCE ne comporte pas l'annexe ; c'est, effectivement, plus simple ainsi.
Il est vrai que, dans la mesure où cette annexe est entièrement republiée chaque année, il suffit de se reporter aux règlements modificateurs.
Ces quelques exemples pour rappeler que l'édition de textes consolidés demeure un exercice suffisamment complexe pour ne pas se satisfaire - pas encore ? - de systèmes automatisés, mêmes si ceux-ci présentent l'immense avantage de permettre un débit important (en volume), et une gestion aisée du multilinguisme (dès lors que, comme celui de l'Union européenne, il est conçu pour celà et que, présupposé fondamental, la rédaction des actes se plie à des règles communes en matière de vocabulaire normalisé - ce qui est généralement le cas du droit communautaire).
Autrement dit encore, lorsque je consolide un texte en intégrant dans la note qui documente la modification non seulement la référence de l'acte modificateur et sa référence de publication, mais également la date à laquelle l'acte modificateur entre en vigueur, ainsi que, si elle est différente, la date d'application de la disposition en cause, voire, s'il s'agit d'une directive, la date de transposition, il me semble fournir une information utile au lecteur. Qu'en outre, soit reproduite la rédaction de la partie concernée du texte telle qu'elle était avant sa modification me paraît également, fréquemment, pertinent... Et que soit indiquée, et documentée, dans le corps du texte, l'existence éventuelle d'une dérogation, voilà qui permet de commencer à parler de "version de référence".
Plus encore : l'évolution du droit communautaire, en particulier la prise en compte croissante du principe de subsidiarité, rend nécessaire que soit rapidement identifiée la mise en oeuvre nationale d'une mesure communautaire ; en d'autres termes, il ne suffit plus de "poser un lien" - et l'exercice est déjà redoutable ! - entre une directive et les textes nationaux pris pour sa transposition, il devient indispensable de "tracer" les mesures nationales d'application des dispositions "optionnelles", ou laissées à l'initiative des Etats membres, mentionnées dans les règlements du Conseil ou de la Commission.
Voilà donc à quoi peut encore, par exemple, servir un éditeur spécialisé.
Et voilà, sans doute, l'explication d'un certain agacement à lire des communiqués de presse institutionnels tels celui de l'OPOCE.
La question que je me pose quelquefois est, à cet égard, la suivante : à quel besoin "marketing" (1) correspondent ces annonces ? Montrer que l'Europe du droit avance ? Certes, mais...
____
(1) En pied du communiqué :
"Contacts et coordonnées de l’Office des publications: [email protected]> "
Navré, Emmanuel, que vous ayez pu croire que je vous suspectais de reproduire servilement le communiqué de l'OPOCE ; il n'en est rien, bien évidemment, et la citation de votre billet est d'ailleurs fort pertinente. Une observation telle que la vôtre sur la limitation du contenu de CONSLEG serait, de fait, bienvenue dans les textes de présentation de l'OPOCE !
Rédigé par : Toupidek | 11 juillet 2007 à 10:20
Pour faire feuilleton américain :-) « Objection votre honneur ! » Non, je ne reproduis pas servilement le communiqué de l'OPOCE, lisez bien :
>> « Enfin », dis-je, parce que personnellement, cela fait quinze ans que j’attend l’exhaustivité des textes consolidés -- et encore n’est-ce pas tout à fait le cas ici (voir infra).
[...]
Pour diminuer la tâche, l'OPOCE a depuis longtemps réduit le champ de CONSLEG, en ne retenant {{que les textes d'une certaine importance}}, ce qui se voit aujourd'hui dans le nombre réduit de textes (3000) retenus dans le Répertoire. <<
Rédigé par : Emmanuel Barthe | 10 juillet 2007 à 20:56