Hier, toute la journée au colloque organisé pour le 10e anniversaire du tribunal administratif de Cergy-Pontoise, en association avec l'Université de Cergy-Pontoise. Thème : "Dix années de croissance du contentieux : quelles réalités ? Quelles réponses".
Pas la prétention (ni la capacité, pour être franc - par ailleurs, pas sûr que cela passionne les quelques lecteurs de ce blog) de faire un compte-rendu des différentes interventions.
Toutefois, quelques chiffres (*) méritent d'être connus, en particulier ceux qui permettent de comprendre ce que représente la notion de contentieux de masse : en 1953, étaient enregistrées 30.000 recours, ils sont 115.000 en 2000, 170.000 en 2009 et 90.000 au seul 1er trimestre de 2010. Quant au tribunal administratif de Cergy, il a enregistré 6.000 recours en 2001 et plus de 14.000 en 2009.
L'accroissement du contentieux est, on le voit, considérable.
La répartition des affaires par type de contentieux est éclairante ; sur 35 matières, 85% des affaires relèvent de 10 d'entre elles et en particulier : le contentieux des étrangers (reconduite à la frontière) : 25% (à partir de 1990 essentiellement), le contentieux fiscal : 12%, le contentieux de police : 11% (dont les permis à points, depuis 1992), celui de la fonction publique : 11%, de l'urbanisme : 6%, du logement : 6% (en augmentation depuis 2000 avec le DALO - droit au logement opposable).
Enfin, la distinction a été opérée entre les contentieux "en série" (de multiples recours contre la même application ou le même règlement, souvent coordonnés par des syndicats, des associations, et identiques ou similaires dans leur forme), dont l'apparition est épisodique - liée à des effets d'aubaine, par exemple -, et les "contentieux de masse", au sens strict, qui présentent en particulier une certaine permanence : typiquement, les contentieux "étrangers", "police", "logement".
Les actes de ce colloques seront publiés, m'a confirmé Mme Odile Pierart, président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, on s'y reportera donc pour découvrir la richesse des différentes interventions.
Je tenais simplement à relever une phrase énoncée par M. Jean-Marc SAUVE, Vice-président du Conseil d'état, dans son allocution de clôture. En prenant la précaution de préciser préalablement qu'elle est extraite de son contexte, qu'elle a peut-être été prononcée en complément du texte écrit, et qu'elle ne vise aucunement à résumer ni à être représentative de la teneur des propos de son auteur. Mais il l'a dite. Voici :
"Et pourquoi pas, un jour, un droit au séjour, comme un droit au logement ?"
Ceci, à mon sens, n'est pas à prendre comme une provocation, mais bien comme une questionnement fort sérieux sur la portée des engagements que pourrait, et devrait, assurer notre société.
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Addendum du 8 décembre :
- La phrase exacte de M. Jean-Marc Sauvé, restituée dans son contexte, est la suivante :
"(...) A cet égard, il est d’ailleurs intéressant de constater l’effet que peuvent avoir les contentieux de masse sur l’office même du juge, en particulier lorsque le législateur prévoit lui-même que le recours exercé devant la juridiction administrative est un recours de plein contentieux. Il ne s’agit plus alors pour le juge d’apprécier la légalité d’une décision administrative, mais bien de reconnaître, en substituant sa propre décision à celle de l’administration, l’existence d’un « droit à », c’est-à-dire d’un droit subjectif. Tel est le cas par exemple du « droit au logement ». Tel pourrait aussi être le cas un jour -pourquoi pas ?- du « droit au séjour » pour un étranger."
- Le texte complet de son intervention est disponible sur le site du Conseil d'Etat, à la page : "Dix années de croissance du contentieux : Quelles réalités ? Quelles réponses ?"
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(*) Cités dans l'intervention du professeur Yves Gaudement (Université de Paris II), reprenant les données de l'étude de M. d'Haem, maître de conférence à l'Université de Cergy-Pontoise). Je les reproduis ici tels que je les ai (peut-être mal) entendus et souvent arrondis en les griffonnant prenant en note.
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